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sur les probabilités.

long-temps au centre de l’univers, en se considérant comme l’objet spécial des soins de la nature, porte chaque individu à se faire le centre d’une sphère plus ou moins étendue, et à croire que le hasard a pour lui des préférences. Soutenus par cette opinion, les joueurs exposent souvent des sommes considérables à des jeux dont ils savent que les chances leur sont contraires. Dans la conduite de la vie, une semblable opinion peut quelquefois avoir des avantages ; mais le plus souvent elle conduit à des entreprises funestes. Ici, comme en tout, les illusions sont dangereuses, et la vérité seule est généralement utile.

Un des grands avantages du calcul des probabilités est d’apprendre à se défier des premiers aperçus. Comme on reconnaît qu’ils trompent souvent, lorsqu’on peut les soumettre au calcul, on doit en conclure que sur d’autres objets il ne faut s’y livrer qu’avec une circonspection extrême. Prouvons cela par des exemples.

Une urne renferme quatre boules noires ou blanches, mais qui ne sont pas toutes de la même couleur. On a extrait une de ces boules, dont la couleur est blanche, et que l’on a remise dans l’urne pour procéder encore à de semblables tirages. On demande la probabilité de n’extraire