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essai philosophique

tralisant un pareil nombre des voix de la majorité, les douze voix restantes représenteraient l’unanimité d’un jury de douze membres, requise en Angleterre pour la condamnation d’un accusé ; mais on serait dans une grande erreur. Le bon sens fait voir qu’il y a différence entre la décision d’un tribunal de deux cent-douze juges dont cent-douze condamnent l’accusé, tandis que cent l’absolvent, et celle d’un tribunal de douze juges unanimes pour la condamnation. Dans le premier cas, les cent voix favorables à l’accusé autorisent à penser que les preuves sont loin d’atteindre le degré de force qui entraîne la conviction ; dans le second cas, l’unanimité des juges porte à croire qu’elles ont atteint ce degré. Mais le simple bon sens ne suffit point pour apprécier l’extrême différence de la probabilité de l’erreur dans ces deux cas. Il faut alors recourir au calcul, et l’on trouve un cinquième à peu près pour la probabilité de l’erreur dans le premier cas, et seulement pour cette probabilité dans le second cas, probabilité qui n’est pas un millième de la première. C’est une confirmation du principe que le rapport arithmétique est défavorable à l’accusé quand le nombre des juges augmente. Au contraire, si l’on prend pour règle le rapport géométrique, la probabilité de l’erreur