Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 7.djvu/79

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’orbe terrestre ; ce qui me fit découvrir les équations séculaires des mouvements des nœuds et du périgée de l’orbite lunaire, équations qui n’avaient pas même été soupçonnées par les astronomes. L’accord très remarquable de cette théorie avec toutes les observations anciennes et modernes l’a portée au plus haut degré d’évidence.

Le Calcul des Probabilités m’a conduit pareillement à la cause des grandes irrégularités de Jupiter et de Saturne. En comparant les observations modernes aux anciennes, Halley trouva une accélération dans le mouvement de Jupiter et un ralentissement dans celui de Saturne. Pour concilier les observations, il assujettit ces mouvements à deux équations séculaires de signes contraires, et croissantes comme les carrés des temps écoulés depuis 1700. Euler et Lagrange soumirent à l’Analyse les altérations que devait produire dans ces mouvements l’attraction mutuelle des deux planètes. Ils y trouvèrent des équations séculaires ; mais leurs résultats étaient si différents que l’un d’eux au moins devait être erroné. Je me déterminai donc à reprendre ce problème important de la Mécanique céleste, et je reconnus l’invariabilité des moyens mouvements planétaires, ce qui fit disparaître les équations séculaires introduites par Halley dans les Tables de Jupiter et de Saturne. Il ne restait ainsi, pour expliquer les grandes irrégularités de ces planètes, que les attractions des comètes, auxquelles plusieurs astronomes eurent effectivement recours, ou l’existence d’une inégalité à longue période, produite dans les mouvements des deux planètes par leur action réciproque et affectée de signes contraires pour chacune d’elles. Un théorème que je trouvai sur les inégalités de ce genre me rendit cette inégalité très vraisemblable. Suivant ce théorème, si le mouvement de Jupiter s’accélère, celui de Saturne se ralentit, ce qui est déjà conforme à ce que Halley avait remarqué ; de plus l’accélération de Jupiter, résultant du même théorème, est au ralentissement de Saturne à très peu près dans le rapport des équations séculaires proposées par Halley. En considérant les moyens mouvements de Jupiter et de Saturne, il me fut aisé de reconnaître que deux fois celui de Jupiter ne surpasse que d’une très petite quantité, cinq fois celui de