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alors leurs inclinaisons et les positions de leurs nœuds changent dans des périodes plus ou moins longues, qui embrassent plusieurs années ; leurs centres doivent pareillement osciller autour de celui de Saturne : tout cela fait varier la figure apparente de l’ensemble de ces anneaux. Leur mouvement de rotation ne change pas sensiblement cette figure, puisqu’il ne l’ait que remplacer une partie lumineuse par une autre située dans le même plan. Il est très probable que les phénomènes observés par M. Schroeter sont dus à des variations de ce genre. Mais, si un point plus ou moins lumineux que les autres est adhérent à la surface d’un des anneaux partiels, ce point doit se mouvoir aussi rapidement que l’anneau, et paraître changer de position en peu d’heures. On peut croire, avec beaucoup de vraisemblance, que c’est un point de cette nature que M. Herschel a observé. J’engage les observateurs munis de forts télescopes à suivre, sous ce rapport, les apparences de l’anneau de Saturne. La variété de ces apparences tourmenta beaucoup les géomètres et les astronomes, avant qu’Huygens en eût reconnu la cause : l’anneau se présenta d’abord à Galilée sous la forme de deux petits corps adhérant au globe de Saturne, et Descartes, qui malheureusement voulut tout expliquer dans ses Principes de la Philosophie, attribua, dans la troisième Partie de son Ouvrage, l’état stationnaire de ces prétendus satellites à ce que Saturne présente toujours la même face au centre de son tourbillon. Nous savons maintenant que cet état répugne à la loi de la pesanteur universelle, et cette raison suffirait pour faire rejeter l’explication de Descartes, quand même nous ne connaîtrions point la cause de ces apparences. Je ne crois pas l’immobilité de l’anneau moins contraire il cette grande loi de la nature, et je ne doute pas que des observations ultérieures, faites sous le point de vue que je viens d’indiquer, ne confirment les résultats de la théorie et les observations de M. Herschel.


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