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rieur à celui que l’on conserve, à mesure qu’ils se présentent, simplifient extrêmement les calculs, et sont l’un des principaux avantages de l’Analyse infinitésimale, qui d’ailleurs, en réalisant les infiniment petits et leur attribuant de très petites valeurs, donne, par une première approximation, les différences et les sommes des quantités.

Le passage du fini à l’infiniment petit a l’avantage d’éclairer plusieurs points de l’Analyse infinitésimale, qui ont été l’objet de grandes contestations parmi les géomètres. C’est ainsi que, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences pour l’année 1779 [1], j’ai fait voir que les fonctions arbitraires qu’introduit l’intégration des équations différentielles partielles pouvaient être discontinues, et j’ai déterminé les conditions auxquelles cette discontinuité doit être assujettie. Les résultats transcendants de l’Analyse sont, comme toutes les abstractions de l’entendement, des signes généraux dont on ne peut déterminer la véritable étendue qu’en remontant par l’Analyse métaphysique aux idées élémentaires qui y ont conduit, ce qui présente souvent de grandes difficultés ; car l’esprit humain en éprouve moins encore à se porter en avant qu’à se replier sur lui-même.

Il paraît que Fermat, le véritable inventeur du Calcul différentiel, a considéré ce calcul comme une dérivation de celui des différences finies, en négligeant les infiniment petits d’un ordre supérieur par rapport à ceux d’un ordre inférieur : c’est du moins ce qu’il a fait dans sa méthode De maximis et dans celle des tangentes, qu’il a étendue aux courbes transcendantes. On voit encore par sa belle solution du problème de la réfraction de la lumière, en supposant qu’elle parvient d’un point à un autre dans le temps le plus court, et en concevant qu’elle se meut dans divers milieux diaphanes avec différentes vitesses, on voit, dis-je, qu’il savait étendre son calcul aux fonctions irrationnelles, en se débarrassant des irrationalités par l’élévation des radicaux aux puissances. Newton a, depuis, rendu ce calcul plus analytique dans sa Méthode des Fluxions, et il en a simplifié et géné-

  1. Œuvres de Laplace, T. X.