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marées n’auraient d’autre effet que de changer la figure permanente de la mer qui parviendrait bientôt à l’état d’équilibre dû aux forces qui les produisent ; mais les périodes de ces marées étant finies, on peut concevoir le mouvement très lent qui en résulte dans chaque molécule comme formé de deux autres, l’un d’oscillation autour du point où cette molécule serait en équilibre si l’action des astres dont ces marées dépendent devenait invariable, et l’autre qui lui est commun avec ce point d’équilibre dont la position change à chaque instant. Le premier de ces mouvements est détruit par les résistances que les eaux de la mer éprouvent ; il ne reste ainsi à la molécule que le mouvement qui lui est commun avec le point où elle serait à chaque instant en équilibre. On peut donc considérer la mer comme étant sans cesse en équilibre sous l’action des astres qui produisent les marées de la troisième espèce, et les déterminer dans cette hypothèse. Ces marées sont très peu considérables ; elles sont cependant sensibles à Brest et conformes au résultat du calcul. Elles offrent le moyen, peut-être le plus exact, pour avoir le rapport de la moyenne densité de la Terre à celle des eaux de la mer, rapport intéressant à connaître et que l’on a cherché à déterminer par l’attraction des montagnes ; mais, pour l’obtenir avec précision, il faudrait au moins un siècle d’observations sur les marées.

On voit, par cet exposé, l’accord de la théorie du flux et du reflux de la mer, fondée sur la loi de la pesanteur, avec les phénomènes des hauteurs et des intervalles des marées. Plusieurs de ces phénomènes m’ont été d’abord indiqués par cette théorie et ont ensuite été confirmés par les observations ; d’autres phénomènes que les observations m’avaient fait connaître, et qui ne me semblaient pas pouvoir dépendre de la théorie, ont résulté de cette même théorie plus approfondie. En général, tous les résultats de la théorie, indépendants des circonstances locales, ont été confirmés par les observations ; et, lorsque ces circonstances ont modifié les résultats de la théorie, j’ai retrouvé le même accord, en y ayant égard. Des observations plus nombreuses, plus précises et plus détaillées que celles qui ont été faites, en la confirmant de plus en