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au moins en grande partie, aux changements que l’air pur éprouve. Tout ce qui tient à la combustion et à la respiration s’explique d’une manière si naturelle et si simple dans cette hypothèse, qu’il ne balança point à la proposer, \sin\thetan comme une vérité démontrée, du moins comme une conjecture très vraisemblable et digne à tous égards de l’attention des physiciens : c’est ce qu’il fit dans un Mémoire Sur la combustion, imprimé dans le Volume de l’Académie pour l’année 1777 (p. 592). M. Craford a présenté une explication à peu près semblable dans un Ouvrage sur ce sujet, publié à Londres en 1779. Ces deux physiciens s’accordent à regarder l’air pur comme la source principale de la chaleur qui se développe dans la combustion et dans la respiration ; il y a cependant une différence essentielle entre leurs opinions et qui consiste en ce que M. Lavoisier pense que la chaleur dégagée dans ces deux phénomènes est combinée dans l’air pur, et que ce fluide doit à la force expansive de la chaleur ainsi combinée son état aériforme ; au lieu que, suivant M. Craford, la matière de la chaleur est libre dans l’air pur : elle ne s’en dégage que parce que l’air pur, en se combinant, perd une grande partie de sa chaleur spécifique. M. Craford appuie cette assertion sur des expériences d’après lesquelles il trouve la chaleur spécifique de l’air pur quatre-vingt-sept fois plus grande que celle de l’eau commune ; si ces expériences étaient exactes, il serait aisé de voir que la chaleur libre existante dans l’air pur est plus que suffisante pour produire tous les phénomènes de la chaleur et que, dans les combustions même où il se dégage le plus de chaleur, telle que celle du phosphore, une partie considérable de la chaleur libre existante dans l’air pur doit se combiner ; mais ces expériences sont si délicates qu’il faut les avoir répétées un grand nombre de fois avant que de les admettre. Ainsi nous nous abstiendrons de prononcer sur leur exactitude, jusqu’à ce que nous ayons déterminé par notre méthode les chaleurs spécifiques des différents airs ; nous nous bornerons ici à comparer les quantités de chaleur qui se dégagent dans la combustion et dans la respiration avec les altérations correspondantes de l’air pur, sans examiner si