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On aura donc ainsi le rapport des chaleurs spécifiques des deux corps et en sorte que, si l’on compare les diverses substances de la nature à une même substance, par exemple à l’eau commune, on pourra déterminer par ce moyen les chaleurs spécifiques de ces substances, en parties de la chaleur spécifique de la substance à laquelle on les rapporte.

Cette méthode, dans la pratique, est sujette à un grand nombre d’inconvénients qui peuvent occasionner des erreurs sensibles dans les résultats ; le mélange des substances dont la pesanteur spécifique est très différente, telle que l’eau et le mercure, est difficile à faire de manière à être assuré que toutes ses parties ont la même température. Il faut ensuite avoir égard à la chaleur dérobée par les vases et par l’atmosphère, tandis que la température du mélange parvient a l’uniformité, ce qui exige un calcul délicat et sujet à erreur. On ne peut, d’ailleurs, comparer directement par cette voie les substances qui ont une action chimique les unes sur les autres ; il faut alors les comparer à une troisième substance sur laquelle elles n’aient aucune action, et, s’il n’existe point de semblable substance, il faut les comparer avec deux corps et même avec un plus grand nombre, ce qui, en multipliant les rapports à déterminer les uns par les autres, multiplie les erreurs des résultats. Cette méthode serait encore d’un usage presque impossible pour avoir le froid ou la chaleur produits par les combinaisons, et elle est absolument insuffisante pour déterminer celle que la combustion et la respiration dégagent. L’observation de ces phénomènes étant la partie la plus intéressante de la théorie de la chaleur, nous avons pensé qu’une méthode propre à les déterminer avec précision serait d’une grande utilité dans cette théorie puisque, sans son secours, on ne formerait sur leur cause que des hypothèses dont il serait impossible de faire voir l’accord avec l’expérience. Cette considération nous a déterminés à nous en occuper d’abord, et nous allons exposer ici celle à laquelle nous sommes parvenus et les réflexions qui nous y ont conduits.

Si l’on transporte une masse de glace refroidie à un degré quel-