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le généraliser encore et l’étendre à tous les phénomènes de la chaleur de la manière suivante : Toutes les variations de chaleur soà réelles, soit apparentes, qu’éprouve un système de corps en changeant d’état, se reproduisent dans un ordre inverse lorsque le système repasse à son premier état. Ainsi les changements de la glace en eau et de l’eau en vapeurs font disparaître au thermomètre une quantité considérable de chaleur qui reparait dans le changement de l’eau en glace et dans la condensation des vapeurs. En général, on fera rentrer la première hypothèse dans la seconde en y changeant les mots de chaleur libre, chaleur combinée et chaleur dégagée, dans ceux de force vive, perte de force vive et augmentation de force vive.

Dans l’ignorance où nous sommes sur la nature de la chaleur, il ne nous reste qu’à bien observer ses effets dont les principaux consistent à dilater les corps, à les rendre fluides et à les convertir en vapeurs. Parmi ces effets, il faut en choisir un, facile à mesurer, et qui soit proportionnel à sa cause ; cet effet représentera la chaleur, de même qu’en Dynamique nous représentons la force par le produit de la massé et de la vitesse, quoique nous ignorions la nature de cette modification singulière, en vertu de laquelle un corps répond successivement à différents points de l’espace. L’effet par lequel on mesure ordinairement la chaleur est la dilatation des fluides et principalement celle du mercure : la dilatation de ce dernier fluide est, suivant les expériences intéressantes de M. de Luc, à très peu près proportionnelle à la chaleur, dans tout l’intervalle compris entre le degré de la glace et celui de l’eau bouillante ; elle peut suivre une loi différente dans des degrés fort éloignés. Nous indiquerons dans la suite un autre effet de la chaleur, qui lui est constamment proportionnel, quelle que soit son intensité.

Nous ferons usage du thermomètre de mercure, divisé en quatre-vingts parties égales, depuis la température de la glace fondante jusqu’à celle de l’eau bouillante à la pression d’une colonne de 28 pouces de mercure ; chaque partie forme un degré, et l’origine des degrés, ou le zéro du thermomètre, est le terme de la glace fondante, en sorte que