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lopperons la cause. En général, on verra, dans le cours de cet Ouvrage, que la loi de la gravitation réciproque au carré des distances représente avec une extrême précision toutes les inégalités observées des mouvements célestes : cet accord, joint à la simplicité de cette loi, nous autorise à penser qu’elle est rigoureusement celle de la nature.

La gravitation est proportionnelle aux masses ; car il résulte du no 3 que, les planètes et les comètes étant supposées à la même distance du Soleil et abandonnées à leur gravité vers cet astre, elles tomberaient en temps égal d’une égale hauteur ; en sorte que leur pesanteur serait proportionnelle à leur masse. Les mouvements presque circulaires des satellites autour de leurs planètes nous prouvent qu’ils pèsent, comme ces planètes, vers le Soleil, en raison de leurs masses ; la plus légère différence à cet égard serait sensible dans le mouvement des satellites, et les observations n’ont fait découvrir aucune inégalité dépendante de cette cause. On voit donc que les comètes, les planètes et leurs satellites, placés à la même distance du Soleil, pèseraient vers cet astre, en raison de leurs masses ; d’où il suit, en vertu de l’égalité de l’action à la réaction, qu’ils attireraient dans la même raison le Soleil, et qu’ainsi leur action sur cet astre est proportionnelle à leurs masses divisées par le carré de leurs distances à son centre.

La même loi s’observe sur la Terre ; on s’est assuré par des expériences très-précises, faites au moyen du pendule, que sans la résistance de l’air tous les corps se précipiteraient vers son centre avec une égale vitesse ; les corps terrestres pèsent donc sur la Terre, en raison de leurs masses, ainsi que les planètes pèsent vers le Soleil et les satellites vers leurs planètes. Cette conformité de la nature avec elle-même, sur la Terre et dans l’immensité des cieux, nous montre de la manière la plus frappante que la pesanteur observée ici-bas n’est qu’un cas particulier d’une loi générale répandue dans l’univers.

La propriété attractive des corps célestes ne leur appartient pas seulement en masse ; mais elle est propre à chacune de leurs molécules. Si le Soleil n’agissait que sur le centre de la Terre, sans attirer particulièrement chacune de ses parties, il en résulterait, dans l’océan, des