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Si on calculait sur ces chiffres l'exposant de relation dans l'espèce Lepus cuniculus, on trouverait la valeur extrêmement faible 0,07.

Ces faits m'avaient d'abord suggéré une théorie que j'ai dû rejeter, car elle est en désaccord avec d'autres faits, mais que je veux indiquer néanmoins, car elle me paraît contenir une part de vérité qui devra peut-être retrouver sa place dans une théorie plus complète. Entre deux espèces affines, le poids de l'encéphale varie toujours comme la puissance 0,56 du poids du corps. Ces deux espèces peuvent être considérées comme dérivant d'un ancêtre commun extrêmement reculé dans les temps, à travers un nombre de générations extrêmement grand; même si l'évolution a donné à ces deux espèces des tailles très différentes, elles ont eu le temps d'arriver chacune à son équilibre. Mais quand a commencé à se produire la variation, brusque ou lente, cette variation peut avoir porté d'abord sur la grandeur du corps, grandeur relativement sensible, comme nous savons, aux influences extérieures. Le système nerveux central n'est point une masse d'éléments homologues simplement additionnés, comme une glande ou un muscle; c'est un réseau d'éléments individuellement spécialisés, assemblés suivant un plan absolument précis, quoique d'une complexité au-dessus de notre imagination: il est très difficile de concevoir qu'un tel organe s'accroisse ou se réduise aussi facilement qu'un muscle, qu'une glande, ou qu'un os; il faut faire intervenir une sorte d'adaptation interne, une évolution du système nerveux nécessairement lente. Soit un individu possédant un corps plus petit ou plus grand que celui de ses parents; il serait possible que son cerveau ne soit accru ou diminué que suivant une progression extrêmement faible, c'est-à-dire suivant un exposant de relation voisin de zéro; si sa variation de taille se fixe chez ses descendants, alors le cerveau va s'adapter peu à peu aux nouvelles dimensions du corps, tendant vers la limite d'équilibre représentée par l'exposant de relation 0,56. Ainsi, on comprendrait que les diverses races d'une même espèce présentent pour l'exposant de relation une valeur intermédiaire entre 0 et 0,56, par exemple 0,25 comme je l'ai trouvé chez le chien, domestiqué, artificiellement sélectionné et varié depuis l'époque néolithique. Dans cette hypothèse, l'exposant de relation plus faible 0,07 trouvé chez le lapin aurait correspondu à une variation plus récente. Mais en étendant le champ de mes observations, j'ai trouvé, comme je l'ai dit plus haut, la valeur 0,25 (ou très voisine de 0,25), pour l'exposant de relation dans une même espèce, trois fois sur trois. Il y a donc là, semble-t-il, une règle fixe, un équilibre particulier, et non une variation en marche, car alors on trouverait vraisemblablement dans les divers cas des valeurs diverses entre 0 et 0,56. De plus, j'ai constaté sans doute possible, sur d'autres espèces, une réduction du poids de l'encéphale par l'effet de la domestication.

Il faut comparer la race domestique à la souche au moyen de l'exposant de relation 0,25. Suivant ce calcul du lapin de garenne au lapin domestique, celui-ci devrait avoir 13 gr. 03 d'encéphale; le poids constaté est de 11 gr. 20; le déficit est de 2 gr. 10, soit environ 15 p. 100. Voilà la mesure de la réduction de l'encéphale par la domestication.