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SAINT-OLAF. 83

spécialité française), portaient sur lui. Un soir, comme je le voyais tout secoué d'un bon rire, je me suis dit : il nous comprend et il saura le prouver. Qui sait pour combien le souvenir de ces heures est entré dans l'Entente Cordiale. Je crois qu'il a eu la' gaieté reconnaissante.

— Je n'en serais point surpris.

— Voyez-ous, il ne suffit pas d'étudier la langue de ses voisins, il faut prendre la peine de les étudier eux-mêmes. Je le répète à tous les Anglais : dans les pays latins et slaves, considérez l'essence féminine ; elle vous expliquera notre politique, notre histoire, notre âme enfin.

Rodney se mit à rire.

— Je voudrais voir la tête d'un de vos compatriotes à qui je dirais que la France est féminine. Il serait dans le cas de m'envoyer ses témoins !

— Si vous lui disiez qu'elle est efféminée, assurément, mais féminine c'est autre chose. Tout homme de pensée connaît la valeur de cette essence-là. Nous lui devons notre intuition, nos dons les plus précieux, notre force ascensionnelle. Chez nous, il s'y mêle d'ailleurs l'élément celte et franc et elle n'affaiblit point notre caractère, au contraire. C'est en province, c'est dans la bourgeoisie moyenne à Paris, que vous en pourriez prendre une idée juste. Vous seriez bien étonné de sa solidité, de sa correction et de son puritanisme.

— En effet, dit mon hôte, avec un sourire moqueur.

— Eh bien, si la France produit le vin de Champagne, elle produit aussi le vin de Bourgogne, le