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L’ÎLE INCONNUE.

reprenne jamais la prépondérance dans ce pays où la mentalité est essentiellement masculine, protestante et puritaine. L’Anglais, suivant une procession, l’Anglais, agenouillé devant l’autel de la Vierge ou d’un saint, m’étonne toujours. Il a l’air gauche et mal à l’aise, comme s’il portait des vêtements féminins. Le Latin et le Slave, dont la force est plus souple, plient le genou, s’inclinent sous une bénédiction, baisent les reliques ou les icones avec une dévotion chevaleresque, innée. Du reste, le catholicisme semble se viriliser, se refroidir en traversant l’âme saxonne. Il devient plus sincère, moins sensuel et moins mystique. La confession, par exemple, est plus digne. Le prêtre anglais n’encourage pas ces confidences où les pénitentes françaises se complaisent et qui constituent un déloyalisme envers le mari. Dans le confessionnal, il reste un gentleman. À ce propos, les confessionnaux de la cathédrale de Wimbledon m’ont causé une véritable surprise. Ils se composent de deux cellules grandes et claires, séparées par une cloison percée du guichet canonique. Dans celle du prêtre, j’ai vu un fauteuil confortable, une table à écrire couverte de paperasses. À un clou, une soutane et un surplis. Dans celle du pénitent, il n’y a qu’un crucifix, une tablette et un agenouilloir devant la grille. Ce décor banal et prosaïque, cette lumière crue qui arrive de la fenêtre doit agir comme une douche sur les dévotes névrosées et les amoureuses. Je me suis rappelé les réduits clos des Pères Jésuites de la rue de Sèvres, à Paris, leur pénombre mystérieuse, ces rideaux de serge noire que les femmes écartaient d’une main tremblante,