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— De la part de monsieur Punch, dit-elle en me tendant une tasse.

— Merci à monsieur Punch ! répondis-je. Bien que je sois une de ses fidèles lectrices, je ne m’attendais guère à être invitée par lui.

— C’est votre récompense, fit M…

— Pas de fausse modestie ! Il n’y a aucun mérite à lire Punch quand on sent l’humour ; il est délicieux !

— Je suis étonné qu’une étrangère le goûte, d’autant plus que la femme, en général, n’a pas la veine humoristique.

— Eh bien, sans me vanter, je crois que je possède cette faculté et j’en remercie les dieux. Elle a été dans ma vie une précieuse source de gaieté, elle n’est pas encore tarie. Les caricatures, les dessins humoristiques font ma joie. J’en ai une collection considérable derrière mon front. Quand l’un ou l’autre ressort, il m’arrive de rire tout haut et toute seule dans ma chambre. Tenez, dans votre avant-dernier numéro, il y en avait un que je n’oublierai pas : un homme du peuple, montrant à son camarade deux collégiens d’Eton avec des chapeaux haut de forme, lui dit d’un air gouailleur : « Regarde, Arry… que le diable m’emporte, s’ils n’ont pas mis le tuyau de poêle avant que la maison soit bâtie ! » Cette remarque, provoquée par la disproportion de ce chapeau d’homme sur une tête d’enfant, me semble de l’humour parfait.

— C’est cela même. Le bon sens est le père de l’humour.

— Voilà pourquoi il est si rare chez la femme, ajouta M. Leslie.