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SAINT-OLAF

Douvres, après une heure un quart de traversée, je me trouve en automne aec un ciel gris et bas, une eau couleur de plomb, un vent âpre traversé par le cri des mouettes. J’en demeurai toute saisie. Pour la première fois, je me rendis compte que l’Angleterre était vraiment dans la mer du Xord. A mesure que nous nous éloignions de la côte, cette impression automnale s’effaça et je ne tardai pas à sentir la douceur reposante de la campagne anglaise. Avec sa fraîche verdure, ses beaux arbres, ses tapis d’herbe drue, elle semble avoir été créée — elle l’a peut-être bien été — • pour le délassement des yeux et des membres d’un peuple de travailleurs. Je ne revois pas sans plaisir les houblonnières du comté de Kent, ses cottages oij conduisent de jolis sentiers ; ses petits moutons paissant dans de savoureuses prairies, soigneusement pourvues d’auges. En Angleterre, l’eau ne manque jamais sur la table de l’animal. Tout le long de la route, on voyait de-ci, de-là, des taches mouvantes de couleurs claires, qui n’étaient autres que des êtres humains, des joueurs de tennis, de cricket, de foot-ball. Ils couraient en avant, revenaient en arrière, agitaient leurs bras, s’aggloméraient, puis s’éparpillaient. De loin, et vu de la hauteur du chemin de fer, cela paraissait drôle, incompréhensible.

Maintenant que je vois plus profond, l’approche d’une ville comme Londres ou Paris me cause un certain émoi. Je n’ai qu’une conception bien faible de ce qu’elles sont réellement, mais elle suffît à me donner la sensation de ma petitesse. Il me semble que je vais disparaître dans une immensité de vie.