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SAINT-OLAF.

ment émus. Au moment où le train s’ébranlait, Ëdilh m’a crié : « Invitez les chiens et le chat à prendre le thé avec vous ! » En me voyant seule sur la plateforme de Wimbledon, j’ai éprouvé un peu de stupeur, puis la bizarrerie de la chose m’a fait sourire. Voilà au moins une fin de visite qui n’est pas banale, me suis-je dit.

Sur cette réflexion, j’ai rejoint la Victoria louée à mon intention. Madame Baring avait exigé que je fisse une longue promenade en voiture. Je lui ai obéi, mais je n’ai vu ni la verdure, ni les fleurs, ni le paysage. Toutes mes facultés de romancier sont demeurées tendues pour imaginer la fin de ce joli chapitre. J’ai essayé de me représenter madame Baring arrivant dans cette maison où elle n’avait pas mis le pied depuis vingt ans et où l’homme qui l’avait aimée reposait dans la mort. J’aurais voulu voir l’expression des physionomies, l’accueil des serviteurs, assister aux funérailles, entendre la lecture du testament.

Aussitôt rentrée à la maison, j’ai demandé le thé et me le suis fait servir dans un angle de la pelouse, mon coin favori, un coin abrité et embaumé par un magnifique tilleul. Je n’ai pas manqué de convier les animaux ainsi qu’Edith me l’avait recommandé. Lord, le chat, un vrai Britisher s’il en fut, prend son thé tous les jours avec nous, on le lui sert dans un large bol acheté à Aix-les-Bains à son intention. Les chiens, eux, ne sont invités que le dimanche. Aujourd’hui, ils ont donc eu une surprise agréable. Je les ai servis généreusement. Comme d’habitude, ils eurent bientôt lapé le contenu de leurs tasses.et alors ils demeu-