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SAINT-OLAF.

Je voulus refuser, mais Edith insista de la façon la plus pressante.

— Restez, je vous en prie, ajouta-t-elle, afin que nous ne soyons pas trop honteux de cette nécessité qui nous oblige à quitter Wimbledon.

— Eh bien, je resterai pour que vous ne noyez pas honteux, répondis-je en souriant.

A ce moment, un couple de corneilles s’abattit sur la pelouse, puis s’éleva de nouveau en jetant des cris aigus et, après avoir décrit quelques cercles, alla se percher sur un arbre voisin.

Miss Baring l’avait suivi du regard,

— Les corneilles le savent, dit-elle en baissant la voix. Pendant trois années de suite, elles sont venues inspecter Saint-Olaf. J’avais toujours pensé que nous aurions Loftshall quand elles s’y établiraient. Et ce printemps, elles y ont fait leur nid. Nous croyons qu’elles portent bonheur.

— J’espère qu’elles n’ont pas été seules à vous porter bonheur ? fis-je alors.

— J’en suis sûre, répondit miss Baring en pressant contre elle le bras que je venais de glisser sous le sien.

Nous partîmes donc aussitôt pour Londres. Pendant le trajet, je m’obstinai à chercher quelque chose d’extraordinaire sur les visages de Rodney et de sa sœur. Ils ne rayonnaient pas plus que celui de mon garçon boulanger. Le jeune homme essaya de lire son journal, mais il le rejeta bientôt sur la banquette et s’abandonna à ses pensées, des pensées qui ne devaient pas être déplaisantes. Dans un cas semblable, le mieux discipliné des Britishers n’eût pas réussi, je gage, à fixer son esprit sur la politique.