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l’île inconnue.

Un de ces silences qui donnent la sensation de l’invisible se fît autour de nous. Les trois intéressés se regardèrent avec une expresion où il y avait de la stupeur, de l’effroi et que le mot anglais « awe » peut seul rendre.

— Je suis fâché pour M. Wilkes, mais content pour vous, chère mère, fit Rodney d’une voix un peu assourdie en repliant lentement la dépêche.

— Taisez-vous, mon enfant, dit madame Baring. Puis comme se parlant à elle-même’.

— C’est une chose si terrible, si sacrée que la mort… elle fait tout oublier.

Edith qui se trouvait debout à ses côtés se pencha vers elle.

— Mère chérie… murmura-t-elle tendrement. J’étais horriblement embarrassée. Les condoléances

eussent été fausses, les félicitations de mauvais goût. Je me contentai de presser très affectueusement une des mains pâles et glacées que mon hôtesse tenait allongée sur le bras de son fauteuil. Puis, pour mettre fin à mon indiscrétion involontaire, je me glissai vers la porte-fenêtre et je passai au jardin.

Au bout d’une demi-heure, mon amie vint m’y rejoindre.

— Il faut que j’aille à Londres pour acheter des vêtements de deuil, me dit-elle. Est-ce que cela vous ennuie de venir avec moi ?

— Pas le moins du monde.

— Nous partirons demain pour Loftshall par le train de 2 h. 40. Mère ne veut pas que vous quittiez Saint-Olaf avant dimanche. Vous savez que vous ne pouvez avoir votre chambre plus tôt à l’hôtel Claridge.