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dans un décor unique, et je partis. Des amis écossais m’avaient indiqué l’hôtel Windsor, à dix minutes du casino. Ils m’avaient assuré que j’y trouverais une bonne société et tout le repos que je pourrais désirer. C’est donc là que je me logeai.

Le jour de mon arrivée, quand j’entrai au restaurant, le maître d’hôtel me désigna une de ces petites tables pour un qui ne sont pas toujours placées au meilleur endroit… Un ! dame ! c’est si peu, — presque rien.

J’avais devant moi deux dames anglaises, la mère et la fille évidemment. Cette dernière captiva aussi tôt mon attention. Ses cheveux, d’un brun doré de châtaigne fraîche, n’étaient point relevés et tordus par une main sèche de puritaine, — le chignon de madame et de mademoiselle John Bull est très caractéristique, — elle avait le teint mat et chaud. De magnifiques yeux bleus d’une profondeur veloutée adoucissaient l’expression un peu dure que lui faisaient son nez aquilin et Tare dédaigneux de ses lèvres fines. C’était une physionomie de contrastes qui ne pouvait manquer d’éveiller mon intérêt. Je lui donnai une trentaine d’années. La première rencontre de nos regards, par-dessus la « cap » blanche de la mère, se prolongea au delà de ce que permet la stricte politesse. Pendant toute une semaine, il y eut entre nous ce jeu de rayons invisibles, mais non imperceptibles, au moyen desquels nous prenons contact les uns avec les autres, jeu qui ne ressemble pas mal à l’escrime. Quand ma voisine faisait un pas en avant, j’en faisais un en arrière. Je ne m’explique pas cet instinct de coquetterie dans l’amitié même,