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l’île inconnue.

peu élevé les trois frères et les quatre sœurs dont elle est l’aînée, cela lui a valu une expérience assez rare chez une jeune fille. Pas de fortune naturellement. Je ne sais pas pourquoi les gens bien s’obstinent à être pauvres, ajouta miss Baring avec une pointe d’humour. En conséquence, pour que mon frère puisse se marier, il faudrait que ma mère héritât, ou que notre oncle l’associât. Mais voilà, Sir Richard blâme les mariages prématurés parce qu’ils augmentent la population de notre pays, et il ne fera rien pour faciliter celui de son neveu. Quand un Anglais se met à avoir un principe, il y tient mordicus et il y sacrifiera tous les siens. Je voudrais au moins que ces amoureux fussent fiancés. Je leur ai ménagé deux journées d’intimité, à eux d’en profiter. C’est assez méritoire de ma part, ajouta Edith avec un petit sourire nerveux, car Rodney est mon unique camarade ; mais si je peux l’empêcher, il n’y aura pas une autre vie gâchée dans la famille.

Sur cette allusion à elle-même, elle me tendit la main pour prendre congé et je la serrai avec une prompte sympathie.

Le lendemain, miss Baring se rendit à Londres, ainsi qu’elle l’avait annoncé et, vers l’heure du thé, un cab s’arrêtait devant le porche de Saint-Olaf. chargé de la petite malle des « week ends », et une jeune fille sautait lestement à terre. Du hall où je me trouvais, mon œil en prit un fidèle instantané. Il saisit à la fois la silhouette élégante, les traits fins, la jolie che elure blond foncé, les yeux d’un brun roux, le teint éblouissant, puis la robe de serge bleue, le chapeau de paille bise relevé de fleurs. Telle que, elle