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SAINT-OLAF.

courtes. Elles portaient des coiffes de toile blanche, des tabliers bleus rapiécés et d’énormes sabots blancs. Vous voyez l’effet, ous entendez le bruit de ces sabots dans un espace de quelques mètres carrés !… L’une d’elles, blonde, avec des traits d’une régularité classique, une fraîcheur flamande, était tout à fait suggestie. Un orchestre invisible accompagnait d’une musique lilée et bizarre ce rite prosaïque du lîve o’clock. Les fidèles appartenaient à la classe moyenne. Il y aait là plusieurs de ces couples de fleureteurs intellectuels que l’on rencontre partout. Ceux qui ont des prétentions artistiques ou esthétiques font ma joie. Lui, a généralement la raie au milieu de la tête, les cheeux plats un peu longs, les épaules tombantes, le teint brouillé, les idées aussi je suppose, le regard vague. Elle… plus fréquemment brune que blonde, est souvent très belle, toujours étrange, avec dans les yeux des lueurs d’Orient. Ses gestes sont lents, étudiés, sa physionomie langoureuse. Elle porte des chapeaux immenses, des robes claires d’étoffes souples, des ceintures extraordinaires, ornées d’invraisemblables cabochons. Ses bracelets, son collier, ses bagues, trahissent le bazar et sont outrageusement exotiques. Lui et elle ont l’air de se dire des choses ineffables, ils ont l’air surtout de s’admirer réciproquement, de vivre dans les yeux l’un de l’autre. Ce sont des Anglais que la nature a greffés dans un de ses moments d’humour… Avec quelle greffe ?… Je l’ignore, mais je suppose qu’elle doit venir de quelque colonie lointaine. D’un clin d’œil, je désignais à miss Baring les spécimens qui se trouvaient là.