Page:Lao-Tseu - Le livre de la voie et de la vertu - traduction Stanislas Julien, 1842.djvu/26

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ho-chang-kong, le plus ancien commentateur de Lao-tseu, qui florissait dans le IIe siècle avant notre ère, explique ainsi ce passage : « Je ne vois ni le corps ni la figure du Tao ; je ne sais comment il faut le nommer : mais, comme je vois que tous les êtres naissent en venant par le Tao, je le qualifie en l’appelant le Tao ou la Voie. »

Ho-kouan-tseu, philosophe Tao-sse, offre (liv. III, fol. 20) une définition analogue du même mot : « Le Tao est ce qui a donné passage aux êtres. »

On peut comparer Tchoang-tseu, philosophe Tao-sse contemporain de Meng tseu, liv. V, fol. 1.

Nous voyons dans le Tao-te-king, chap. xxi, note 6, un curieux passage où Lao-tseu compare le Tao ou la Voie, à une porte par laquelle passent tous les êtres pour arriver à la vie.

Il résulte des passages qui précèdent, et d’une foule d’autres que je pourrais rapporter, que, dans Lao-tseu et les plus anciens philosophes de son école antérieurs à l’ère chrétienne, l’emploi et la définition du mot Tao excluent toute idée de cause intelligente, et qu’il faut le traduire par Voie, en donnant à ce mot une signification large et élevée qui réponde au langage de ces philosophes, lorsqu’ils parlent de la puissance et de la grandeur du Tao.

Lao-tseu représente le Tao comme un être dépourvu d’action, de pensées, de désirs, et il veut que, pour arriver au plus haut degré de perfection, l’homme reste, comme le Tao, dans un quiétisme absolu ; qu’il se dépouille de pensées, de désirs, et même des lumières de l’intelligence, qui, suivant lui, sont une cause de désordre. Ainsi, dans son livre, le mot Tao signifie tantôt la Voie sublime par laquelle tous les êtres sont arrivés à la vie[1], tantôt l’imitation du Tao, en restant, comme lui, sans action, sans

  1. Cf. chap. i, iv, vi, xxi, xxv, etc.