Page:Lao-Tseu - Le livre de la voie et de la vertu - traduction Stanislas Julien, 1842.djvu/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Il me reste à parier du mot Tao, qui fait le sujet du Tao-te-king.

Les lettrés, les bouddhistes et les Tao-sse font un grand usage de ce mot, et l’emploient chacun dans un sens différent.

Chez les écrivains de l’école de Confucius, il se prend, au figuré, dans le sens de voie, et exprime la conduite régulière qu’il faut suivre, soit pour bien gouverner, soit pour pratiquer les principales vertus sociales ; ainsi l’on dit : la voie de l’humanité, de la justice, des rites. « La voie n’est pas fréquentée, dit Confucius ; je sais pourquoi : les hommes éclairés l’outre-passent, les ignorants ne l’atteignent pas. »

Chez les bouddhistes, le mot Tao a reçu, suivant le dictionnaire San-ts’ang-fa-sou[1] le sens de Pou-thi, transcription chinoise du mot sanskrit [..] bouddhi, intelligence[2]. « Sous les dynasties des Tsin[3] et des Song (de 265 à 501 après J. C.), la doctrine de bouddha ne faisait que commencer à se répandre en Chine. Les Bouddhistes n’avaient pas encore reçu le nom de Seng  ; on les appelait généralement Tao-jin 道人, c’est-à-dire les hommes de l’intelligence (les hommes qui cherchent à atteindre l’intelligence, le principal attribut de Bouddha et le plus haut degré de la perfection). »

Nous lisons, dans le Chin-i-tien[4], que les Tao-jin 道人 (les bouddhistes) se liguèrent avec les Tao-sse 道士 (les sectateurs de Lao-tseu) pour combattre les Jou (ou les lettrés de l’école de Confucius).

Je saisis cette occasion pour corriger une grave erreur historique relative à la propagation de la doctrine de Lao-tseu, erreur

  1. San-ts’ang-fa-sou. liv. XLII, fol. 14 verso. lin. 4.
  2. Cf. Fo-koue-ki, p. 108, I. 30 ; et Wilson, Dictionn. sanskrit, 3e édit. p. 605.
  3. Ce passage est tiré de l’encyclopédie Fen-loui-tseu-kin. liv. XLVI, fol. 69 verso.
  4. Chin-i-tien (dans la collection Kou-kin-thou-chou), liv. LVII, fol. 6.