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nieuse, est loin d’être fondée. Si je ne m’abuse pas, les lecteurs partageront le même avis après avoir lu le texte du chapitre xiv et les commentaires qui l’accompagnent. Les trois syllabes i, hi, weï, que ce savant regarde comme étrangères à la langue chinoise et purement phonétiques, et où il a cru voir la transcription fidèle du tétragramme hébraïque [..] (Jéhova), ont en chinois un sens clair et rationnel qui s’appuie de l’autorité de Ho-chang-kong, philosophe Tao-sse, qui florissait l’an 163 avant J. C. et qui, suivant M. Rémusat lui-même, paraît mériter une entière confiance. Il est permis de penser que l’illustre professeur aurait renoncé à cette manière de voir, s’il avait pu faire usage de l’antique et précieux commentaire de Ho-chang-kong.

La première syllabe, i, signifie dépourvu de couleur ; la seconde, hi, dépourvu de son ou de voix ; la troisième, weï, dépourvu de corps.

D’où résulte ce sens de la première phrase du chapitre xiv :

« Vous le regardez (le Tao) et ne le voyez pas : il est sans couleur (incolore) ;

« Vous l’écoutez et ne l’entendez pas : il est sans voix (aphone) ;

« Vous voulez le toucher et ne l’atteignez pas : il est sans corps (incorporel). »

Cette interprétation de Ho-chang-kong est confirmée par les commentateurs les plus renommés, par exemple Thi-we-tseu, Fo-koueï-tseu, Te-thsing, Li-yong, etc. etc. Elle se trouve aussi dans un extrait considérable de Lao-tseu, qui fait partie d’un recueil de fragments philosophiques intitulé Tseu-p’in-kin-han, que possède la Bibliothèque royale.

D’un autre côté, les nombreux commentaires de Lao-tseu que j’ai à ma disposition, n’offrent pas un seul passage qui permette