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Les émotions modernes

Quelque jour, cependant, les phrases cristallines
Illusionnent moins leur cœur insatisfait ;
Ils comprennent bientôt que leur amour décline,
Ils voudraient retenir, retenir à jamais.
En leurs nerveuses mains, le multiple visage
De celle qui s’en va vers l’inconnu des âges,
Cœur et chair de mensonge ! Ils demeurent hantés
De son passage ardent, et, délirants, farouches,
Retombant de plus haut dans la réalité
L’appellent, vainement, de leur saignante bouche
Qui, pourtant, clame encor qu’il est bon, qu’il est beau,
De perdre ainsi ses jours entre les bras de femmes.

Et comme Lamartine, et comme Olympio,
Frères par la souffrance avec toutes les âmes,
Ils retournent, là-bas, vers les sites jadis
Parcourus avec elle… Au moins, les paysages
Auxquels s’associait si bien son cher visage
Souffrant, croient-ils, de les revoir seuls et vieillis,
Pleureront avec eux leur amante infidèle ?
Non ! la Nature, hélas ! sévère autant que belle,
Autour d’eux resplendit mais ne les touche plus…
Et, le soleil couchant peut prolonger les plaines
De ses prismes de feux à l’ombre confondus ;
Les bois roux ébranlés de brises surhumaines
Peuvent hurler, parmi l’espace et les senteurs,