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VOLTAIRE EN ANGLETERRE.

de ces maximes faites pour « armer les sujets et fomenter les révoltes ». L’abbé Molinier raillait les grands mots de liberté et d’esclavage :

« Les fers sont durs à porter, mais heureusement c’est une expression poétique qu’on emploie ordinairement en amour comme en politique, et dont on ne doit pas être plus effrayé en ce pays que les amants ne le sont à Cithère. »

La lettre XI, sur l’insertion de la petite vérole, nous introduit à la philosophie anglaise. L’inoculation est un acte de liberté philosophique : on en a la preuve par la riposte qui fut faite à Voltaire : « Le naturel des Français se révolte au système de l’insertion ; nous nous soumettons aux décrets de la Providence ».

Puis venaient les lettres XII-XVII sur Bacon, Locke et Newton : éloge enthousiaste, de la méthode expérimentale et de son fondateur Bacon, démonstration par Locke et Newton de ses applications à la métaphysique comme à la physique, vive critique des rêveries scolastiques et des « romans » de Descartes et de Malebranche, énergique défense du principe de Locke, que Dieu tout-puissant a pu donner à la matière, qui ne l’a point nécessairement, la propriété de penser. Ces lettres tombaient au moment où les tourbillons de Descartes régnaient dans l’Académie des sciences, et où les théologiens, inquiets longtemps de la métaphysique cartésienne, y découvraient un spiritualisme qui pouvait se mettre au service de la religion. Malgré l’estime du P. Buffier pour Locke, malgré le livre de Maupertuis sur Newton, les Français demeuraient attachés, un peu