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VOLTAIRE.

mesure et un esprit à son goût. Comme l’Église s’est faite la protectrice et la directrice de la monarchie, le libéralisme tend à se confondre avec le voltairianisme. Et dans le voltairianisme une partie émerge, et finit par le constituer à elle seule, c’est la haine de l’Église et le mépris de la religion. D’ailleurs, depuis la Révolution, presque toute la politique de Voltaire est inutile, sauf en ce qui regarde la liberté de la presse : l’état de la France nouvelle rétrécit Voltaire au voltairianisme anti-clérical.

Ce sera pendant tout le reste du xixe siècle le rôle de Voltaire, de nourrir l’anticléricalisme. Aussi sa faveur correspondra-t-elle aux époques où le cléricalisme paraîtra le plus menaçant. Le voltairianisme gouvernera après 1830, instruira la jeunesse par l’université. Mme Ackermann, née en 1828, s’en imprégnera auprès de son père.

1848, comme la grande révolution, rejettera Voltaire, qui n’est pas suffisant pour la situation. Mais, sous le second Empire, sous la troisième République, on le retrouvera dans les polémiques du Siècle et du XIXe Siècle.

Cependant l’influence voltairienne, après 1850, ira s’affaiblissant, se perdant dans la masse de la tradition du xviiie siècle, qui elle-même s’amincit et s’use. Par la Révolution, Voltaire avait perdu la noblesse. La loi Falloux, la peur du socialisme, en ramenant la bourgeoisie à la religion, lui ôtent au xixe siècle les lecteurs qui le sentaient le mieux, et pour qui il était exactement fait. Plus l’anticléricalisme descend de la bourgeoisie dans le peuple,