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FORMATION DE LA LÉGENDE VOLTAIRIENNE.

que c’était bien fini, et qu’il ait accepté la nécessité. Il mourut le 30 mai 1778, sur les onze heures du soir.

L’archevêque de Paris et le curé de Saint-Sulpice lui refusèrent la sépulture. Le roi dit ou passa pour avoir dit : « Laissez faire les prêtres » ; ni le ministère ni le Parlement ne voulurent intervenir. Voltaire avait désigné pour sa sépulture l’étoile de la charmille de Ferney. Mais Ferney était loin : l’évêque d’Annecy était à craindre. Il fallait agir vite, prévenir la vengeance ecclésiastique. L’abbé Mignot mit le corps dans un carrosse, enveloppé de sa robe de chambre et coiffé d’un bonnet de nuit. Il l’emporta à l’abbaye de Scellières en Champagne dont il était abbé commendataire. Là, Voltaire fut mis en bière et enseveli (1er-2 juin). Le prieur qui l’avait permis fut destitué par l’évêque de Troyes.

Voltaire n’attendit pas longtemps sa revanche. La Révolution le ramena à Paris en juillet 1791. Un cortège triomphal, — municipalité, députés, magistrats, Académiciens, jeunes filles vêtues de blanc, canonniers et chœurs de l’opéra, — le conduisit au Panthéon au milieu de l’enthousiasme universel. Déjà pourtant l’évolution politique de la France laissait Voltaire en arrière : mais le peuple se souvenait du défenseur de l’humanité. C’était Calas qui conduisait Voltaire au Panthéon dans une apothéose.