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FORMATION DE LA LÉGENDE VOLTAIRIENNE.

crède et manifestait le désir d’« embrasser » l’auteur. D’Argental, le marquis de Villette l’appelaient à Paris ; Mme Denis avait envie d’y revenir. Le 5 février 1778, il partit « dans sa dormeuse, avec un petit poêle dedans ».

Il arriva à Paris le 10 février sur les trois heures et demie du soir, et se logea chez le marquis de Villette, rue de Beaune, à l’angle du quai dés Théatins. On sait ce qui advint : il se grisa de sa gloire, et il en mourut.

Si le roi trop dévot ne permit pas à la reine de le voir, Paris l’en consola. Les visites affluaient rue de Beaune : les amis, les écrivains, les députations de l’Académie et de la Comédie-Française, Gluck, Mme Necker, la comtesse de Polignac, Mme du Barry, l’ambassadeur d’Angleterre, la loge maçonnique des Neuf-Sœurs, Franklin dont il bénissait le petit-fils en disant : God and liberty, toute sorte d’hommes et de femmes de tous les états. Le 16 mars avait lieu la première représentation de sa tragédie d’Irène, devant la reine et le comte d’Artois.

Remis d’une maladie qui avait fermé sa porte pendant trois semaines, il sortait en voiture au milieu d’une foule enthousiaste qui acclamait « l’homme aux Calas ». Il allait voir Turgot. Il se rendait le 30 mars à l’Académie, et de là, en magnifique habit, avec sa grande perruque, enveloppé de la pelisse que lui avait envoyée l’impératrice de Russie, il allait à la Comédie assister à la sixième représentation d’Irène. Un des acteurs lui posait sur la tête une couronne de laurier, et, à la fin de la pièce, toute la troupe assemblée sur la scène, son buste était