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VOLTAIRE.

En 1772, il prenait en main la cause de Mlle Camp, une protestante que le vicomte de Bombelles avait épousée au désert, devant un pasteur, et qu’il laissait pour faire un riche mariage catholique, après en avoir eu un enfant : il soutenait la nullité de sa première union. Voltaire ne put réussir qu’à faire obtenir quelque argent à la victime.

Moins heureux et moins clairvoyant fut-il quand il se prit à défendre le comte de Morangiés contre ses créanciers. Le public, cette fois, fut rebelle. Il ne s’agissait que d’argent, et, si les créanciers avaient bien mine de fripons, le débiteur n’était certainement pas un honnête homme. Il fut d’ailleurs parfaitement ingrat pour son officieux défenseur.

Quoique Voltaire se défendît d’être le « Don Quichotte de tous les roués et de tous les pendus », il ne savait guère résister aux apparences d’injustice de cruauté. Il criait et faisait crier.

Lorsqu’il apprit qu’il y avait encore des mainmortables en France et qu’à quelques pas de chez lui, 12 000 hommes étaient les serfs de vingt chanoines de Saint-Claude, il fut stupéfait. Depuis 1770, il assiégea de ses requêtes le conseil du Roi, Turgot ; il soutint et encouragea l’avocat Christin, de Besançon, qui avait pris en main la cause des habitants du mont Jura ; il travailla l’opinion. Ses clients ne furent affranchis que par la Révolution.

De la même ardeur, ne pouvant libérer la France de la gabelle, il s’occupa d’en décharger son petit pays de Gex, où les commis et les contrebandiers étaient également des fléaux pour les gens paisibles. Il négocia longuement afin d’obtenir des fermiers