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VOLTAIRE.

n’ait souvent raison, et il suffit de comparer la seconde édition de la Philosophie de l’histoire à la première pour en avoir la preuve, par toutes les corrections que fit Voltaire. Bévues géographiques, grammaticales (un certain Basiloi), traductions inexactes, citations fausses, sources mal employées : l’exact savant déniche toutes ces fautes que le brillant littérateur, dédaigneux des vérifications, entasse étourdiment. Mais à ce menu nettoyage s’arrête le triomphe de Larcher. Il a bien souvent tort sur le fond des choses, il chicane, il subtilise, il étale des citations qui ne prouvent rien ; il est étroitement, puérilement conservateur, et il n’a pas du tout l’impartialité critique : il se pose en défenseur de la religion, et n’admet aucun scepticisme dans l’histoire sacrée ou profane. Sarah inspirant à plus de soixante-dix ans de l’amour à un roi d’Égypte, est une vérité historique, et il confirme l’autorité de l’Écriture par l’histoire de Ninon de Lenclos qui, à pareil âge, récompensa, croit-il, un adorateur.

Dans toute la critique de Larcher, il n’y a qu’un point important où il ait bien l’avantage : c’est sur les prostitutions sacrées de Babylone. Il a raison ici avec bon sens autant qu’avec érudition, et le piquant est qu’il bat Voltaire, sans le dire, avec ses propres armes, avec un principe voltairien que Voltaire oubliait par galanterie pour les dames babyloniennes.

Dès que la superstition a autorisé un usage, disait Larcher, on n’y trouve plus rien qui répugne, ou du moins on sacrifie ses répugnances, ou même on s’en fait un nouveau mérite[1].

  1. P. 88. — Comparez Voltaire, XXV, 120 : « Les hommes