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LA PHILOSOPHIE DE FERNEY.

l’étourdie. Il se fit ainsi des affaires avec les érudits, gens prudents et méticuleux, et qui n’aiment pas les incursions des profanes sur leurs domaines. Il fut en dispute courtoise pendant quinze ans avec Foncemagne sur le Testament du cardinal de Richelieu. Il eut le dessous, puisqu’il ne réussit pas à faire admettre sa thèse de l’inauthenticité de cet écrit. Mais ce que l’on ne remarque pas assez, c’est que son effort ne fut pas perdu pour la science. Avant lui, le Testament de Richelieu se présentait au public dans de fâcheuses conditions, entre les testaments très apocryphes de Colbert et de Louvois, sans garantie d’aucun sorte. Voltaire posa la règle que l’éditeur d’un ouvrage posthume doit « rendre un compte rigoureux de l’origine et du sort du manuscrit » : cette règle étonnait alors les érudits. « La loi est nouvelle », disait le savant Ménard. Mais Foncemagne n’eut raison de Voltaire que par ce qu’il satisfit à sa curiosité. Grâce à Voltaire aussi, l’affirmation de l’authenticité du Testament changea de sens. Foncemagne fut obligé d’établir, pour résoudre certaines objections, que le cardinal avait eu des collaborateurs, que la rédaction n’était pas toute de sa main. En somme, le doute de Voltaire amena la question du Testament de Richelieu à prendre une forme scientifique.

Avec Larcher l’engagement fut plus vif, et discourtois des deux côtés. Voltaire se moqua de lui cruellement, mais Larcher avait commencé par le traiter de Capanée et de bête féroce : il avait toujours joint les qualifications les plus dures à ses rectifications.

Il n’y a pas à douter que, sur le détail, Larcher