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VOLTAIRE.

lumière, relient la question particulière aux questions plus générales qui la dominent, en indiquent les origines historiques, la mettent en rapport avec les mœurs et la vie : le tout est saupoudré de sel et de piment, d’épigrammes, de bouffonneries, et d’actualités.

Les interlocuteurs des dialogues sont pourtant toujours retenus par la thèse qu’ils incarnent. Plus vivants, plus colorés, plus riches de réalité sont les acteurs des facéties. Voltaire imite tous les accents, parle anglais ou latin, silhouette tous les états et tous les peuples. La verve est plus large, la couleur est toujours fine, mais plus grasse, plus chaude que dans les romans. Les Questions sur les miracles sont un album d’amusantes caricatures genevoises. Et voici un coin du Paris du xviiie siècle :

Frère Triboulet, de l’ordre de frère Montepulciano, de frère Jacques Clément, de frère Ridicous, etc. etc. etc., et de plus Docteur de Sorbonne, chargé de rédiger la censure de la fille aînée du roi, appelée le concile perpétuel des Gaules, contre Bélisaire, s’en retournait à son couvent tout pensif. Il rencontra dans la rue des Maçons la petite Fanchon, dont il est le directeur, fille du cabaretier qui a l’honneur de fournir du vin pour le prima mensis[1] de messieurs les Maîtres.

Le père de Fanchon est un peu théologien comme le sont tous les cabaretiers du quartier de la Sorbonne. Fanchon est jolie, et frère Triboulet entra… pour… boire un coup.

Quand Triboulet eut bien bu, il se mit à feuilleter les livres d’un habitué de paroisse, frère du cabaretier, homme curieux, qui possède une bibliothèque assez bien fournie.

Il consulta tous les passages par lesquels on prouve évidemment que tous ceux qui n’avaient pas demeuré dans le quartier de la Sorbonne, comme par exemple les Chinois, les Indiens, les Scythes, les Grecs, les Romains, les Germains,

  1. Assemblée mensuelle de la Faculté de théologie.