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VOLTAIRE.

elle peut être améliorée. Comment ? par le travail, mais par le travail social, par l’effort en commun où chacun trouve son compte. Raisonner sur la métaphysique ne sert à rien : l’action pratique doit se substituer à la creuse spéculation. Il faut cultiver notre jardin.

Voilà la conclusion, modérée, courageuse et claire, qui se prépare tout le long du conte, et qui est mise en lumière par les derniers épisodes, par la rencontre du bon Turc, par la réunion finale des principaux personnages dans la petite métairie des bords du Bosphore, où même le moine devient utile à la communauté.

Candide n’est ni désolant, ni désolé, ni purement négatif et critique : c’est la parabole essentielle de la philosophie voltairienne qui tend toute à l’augmentation du bien-être.

Pas un chapitre, pas un épisode, pas une silhouette qui ne découvre l’illusion ou le mensonge de l’optimisme, et, à mesure que le dénouement approche, l’utilité de l’action sociale. Les faits sont circonstanciés si clairement qu’ils font eux-mêmes saillir l’idée dont ils sont le symbole. Leur puissance démonstrative est en raison directe de leur netteté pittoresque ou comique.

C’est un lieu commun de dire qu’il n’y a pas de psychologie dans Voltaire. On a raison, si, par psychologie, on entend l’invention de Racine ou de Marivaux. Voltaire, comme Lesage, est moraliste plus que psychologue. Il utilise la psychologie faite pour construire les bonshommes composés de sentiments moyens ou possédés de manies intenses dont ses thèses ont besoin.