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VOLTAIRE.

par l’Orient et finit par l’Orient. De 197 chapitres, il en donne 90 aux tableaux des mœurs, des institutions, des arts, de l’esprit des peuples et des époques : dans ceux même où domine la narration des guerres et de l’histoire politique, il choisit encore les faits les plus significatifs d’états de civilisation.

Je voudrais découvrir, écrit-il quelque part, quelle était alors la société des hommes, comment on vivait dans l’intérieur des familles, quels arts étaient cultivés, plutôt que de répéter tant de malheurs et tant de combats, funestes objets de l’histoire, et lieux communs de la méchanceté humaine[1].

Il s’intéresse à la façon dont on s’habille au moyen âge, dont on s’éclaire, on se chauffe, on travaille, au prix de la viande et du pain : à quel moment on a inventé les besicles, les moulins à vent, la faïence, les cheminées : comment les maisons étaient couvertes[2]. Il voit la barque des pirates normands, les provisions de « bière, de biscuit de mer, de fromage et de viande fumée » avec lesquelles ils se mettaient en route[3].

Seuls les faits précis donnent une connaissance claire : il aligne les détails caractéristiques, les anecdotes singulières. Nous voici loin des historiens qui ne distinguaient pas les Francs de Clovis de la cour de Louis XIV : celui-ci saisit toutes les différences des civilisations passées ; il les saisit avec plus de vivacité que de sérénité. Il se moque ou s’indigne de tant de siècles qui n’ont pas ressemblé à son siècle.

  1. XII, 53. Cf. XXXIX, 207.
  2. XI, 275 ; XII, 55.
  3. XI, 305.