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VOLTAIRE.

à certains pays, à certaines époques, des moteurs puissants qui accomplissent un énorme travail de civilisation : ce sont les grands hommes. Et quand le grand homme a la chance de détenir la souveraine autorité, son action, son rendement, si je puis dire, est immense. Cette chance suprême s’est rencontrée quatre fois en Occident, depuis les commencements de l’histoire : d’où les quatre grands siècles, de Philippe et Alexandre, de César et Auguste, des Médicis, de Louis XIV. Ainsi se combinent dans l’esprit de Voltaire les grands hommes et le hasard pour faire la fonction motrice que Bossuet confiait à la Providence.

La couleur du Siècle de Louis XIV tient à cette multiplicité de points de vue qui, par les jours variés dont elle éclairait les faits, mettait en joie l’intelligence alerte du xviiie siècle. Elle tient aussi à l’art qui en a réalisé l’exposition.

Voltaire a, comme toujours, voulu être clair, court, dégagé ; il a simplifié, débrouillé, allégé. Il a voulu que son récit eût l’intérêt d’une tragédie : il y a réussi dans l’histoire des traités et des guerres, où la chronologie enchaîne les événements. On suit l’ascension, puis la descente du soleil royal, depuis son lever éblouissant jusqu’aux lueurs sanglantes de son coucher. L’entrée en scène de Louis XIV est préparée par une introduction qui mesure strictement la justice à Louis XIII et Richelieu. Alors paraît le jeune roi qui, en quelques années, redresse la France et la porte au-dessus de tous les États européens. Puis on voit tout converger vers l’invasion de la Hollande. Un mouvement allègre porte Louis XIV