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VOLTAIRE.

supérieure de la civilisation française du xviie siècle, et la vraie gloire du grand roi. Le Siècle se disposait ainsi en apothéose de l’esprit.

Entre 1738 et 1742 l’ordonnance fut modifiée. Les affaires ecclésiastiques interrompaient la progression. Elles furent rejetées à la fin : elles formèrent l’envers du beau règne. Les disputes et les persécutions religieuses, superstition et fanatisme, c’est « l’histoire des fous ». Le xviie siècle, qu’on ne peut surpasser dans la poésie et les arts, a laissé un progrès à faire dans la philosophie au siècle de Louis XV et de Frédéric II. Ainsi s’expliquent le ton sarcastique du récit des affaires religieuses, et ce chapitre final des cérémonies chinoises, qui ne surprend plus quand on y voit le symbole de la raison chassant le fanatisme.

Glorification donc de l’intelligence humaine, dérision de la sottise humaine, voilà les deux idées sous lesquelles se rangent tous les faits du xviie siècle. Elles supposent une idée plus large, moins partiale, plus historique : celle de faire l’histoire du siècle, et non celle du roi[1]. Idée à peine entrevue en théorie par Fénelon, totalement négligée en pratique par tous les historiens, par Bossuet comme par Daniel. Voltaire est le premier historien de la civilisation. Ce n’est pas chez lui un point de vue fortuit et secondaire, il se lie aux plus profonds sentiments de sa nature, à sa philosophie du bonheur.

… Il ne reste pins rien que le nom de ceux qui ont conduit des bataillons et des escadrons, il ne revient rien au genre humain de cent batailles données ; mais les grands hommes
  1. XIV, 155. XV, 105. XXXIII, 483, 492, 506. XXXV, 414, etc.