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les grands artistes classiques.

sont plus théologiens, et s appliquent aux descriptions exactes des passions. Le zèle est égal des deux parts. Cependant il ne s’élève aucun talent supérieur, et les meilleurs sermons sont des œuvres d’une assez égale médiocrité. L’oraison funèbre et le panégyrique, comme discours d’apparat, restent singulièrement au-dessous des sermons, où la nécessité d’instruire et d’édifier met des limites aux excès du bel esprit. Il y a eu pourtant de bonnes parties, dans quelques oraisons funèbres de Henri IV ; mais après cela on ne rencontre rien qui soit même passable, jusqu’aux oraisons funèbres des deux Henriette.

Saint Vincent de Paul exerça une sérieuse influence sur l’éloquence religieuse. M. Vincent, comme on l’appelait, était ennemi de l’éloquence : il ne pouvait souffrir l’esprit, la pompe, la science étalée et ronflante. Il n’estimait que l’effusion du cœur qui va au cœur. Il parlait lui-même avec son cœur, sans étude, sans apprêt, familièrement, efficacement : son idéal est l’homélie simple et touchante des premiers temps de l’Église. Par son exemple, par l’autorité de sa haute vertu, par les conférences qu’il institua à Saint-Lazare pour former les jeunes prédicateurs, M. Vincent contribua plus que personne à mettre le discours chrétien dans la voie de la sérieuse et utile simplicité : il ne put sans doute proscrire, comme il le voulait, l’éloquence ; il enseigna du moins à en faire bon usage, à la subordonner aux fins essentielles de la parole chrétienne. Bossuet profita de ces enseignements [1].


2. BOSSUET : L’HOMME ET L’ÉCRIVAIN.


L’œuvre de Bossuet est immense et variée [2] : elle trouve son unité dans son rapport à la vie et au caractère de l’homme.

  1. À consulter : A. Lezat, De la prédication sous Henri IV, Paris, in-8, 1871. De Tréverret, Du panégyrique des saints avant Bossuet, Paris, 1808. Jacquinet, les Prédicateurs du xviie siècle avant Bossuet, in-8. Lettres de saint Vincent de Paul, Paris, Dumoulin, 1882, 2 vol. in-8.
  2. Éditions : Recueil d’oraisons funèbres composées par messire Jacques-Bénigne Bossuet, etc., Paris, chez la veuve de Sébastien Mabre Cramoisy. 1689, in-12 ; Histoire des variations des églises protestantes, Paris, veuve de S. Mabre Cramoisy, 1688, 2 vol. in-4 ; Discours sur l’histoire universelle, Paris, Mabre Cramoisy, 1681, in-4 ; 3e éd., Paris, Roulland, 1700, in-12. Œuvres complètes, éd. Déforis. 1772-1788, 19 vol. in-4 ; éd. de Versailles, 1815 et suiv., 43 vol. in-8 ; éd. Lachat, Paris, Vivès, 1862-4, 31 vol. in-8 ; Œuvres inédites, publ. par Floquet, 1828, in-8 ; Œuvres oratoires. éd. critique de l'abbé Lebarq, Paris et Lille, 1890-1896, 6 vol. in-8, Lettres et pièces inédites et peu connues, recueillies par A. Gasté, Caen, 1893, in-8. Second traité sur les États d’oraison, publ. par É. Levesque, Paris, 1897. Correspondance, p. p. Urbain et Levesque, t. I et II, 1909. — À consulter : Floquer, Études sur la vie de Bossuet, 3 vol. in-8, 1855-56 ; Bossuet précepteur du Dauphin, 1864 ; Mémoires et Journal de l’abbé Ledieu, 1856-57, 4 vol. ; l’abbé Vaillant, Études sur les sermons de Bossuet d’après les manuscrits, 1851 ; Gandar, Bossuet orateur, 1866, ; Bonnel, De la contro-