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LES ÉCRITS THÉORIQUES DE CORNEILLE.

l’exposition, c’est-à-dire le premier acte, fournira toutes les données, fera apparaître tous les personnages. Tous les éléments de la solution cherchée doivent être mis d’abord sous les yeux du public sinon, et si l’on a besoin d’introduire au cours de la pièce une donnée nouvelle, un agent nouveau, c’est l’aveu que le problème était d’abord mal posé ou insoluble. Comme le dénouement doit être le terme nécessaire de l’action il faudra que l’action soit liée et continue jusqu’au dénouement : liaison des actes, laissant tous (sauf le dernier) le sentiment de l’inachevé, du non-définitif ; liaison des scènes, chaque scène tour à tour tirée et tirant, produite et productrice. Il faudra que l’on suppose le moins d’intervalle qu’on pourra entre l’exposition et le dénouement, et surtout entre les actes, de peur de relâcher la dépendance rigoureuse du dénouement : car si le travail des acteurs n’est pas continu, qui garantira que ce qui précède est cause de ce qui suit, et qu’il n’a pas pu ou dû se glisser dans l’intervalle quelque facteur inconnu, auquel une part d’action reviendra ? qui garantira ou rendra vraisemblable la conservation des forces en conflit et de leur relation réciproque, pendant le repos des acteurs ? Enfin le dénouement doit tout conclure, répondre à tout ce que l’exposition a proposé, ne laisser aucun personnage dans un état de suspension et d’attente : en un mot, c’est une liquidation générale de tous les intérêts et une retraite définitive de tous les agents. Ce dénouement doit n’être que le prolongement naturel de l’action initiale, il doit se produire par le simple jeu des ressorts choisis au début : ni les revirements subits,