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CORNEILLE.

disait-il, écrits depuis trois ans, et qui n’étaient vrais que de la veille. C’est la fameuse Excuse à Ariste, où se lisaient ces aveux :

Je sais ce que je vaux, et crois ce qu’on m’en dit.
Pour me faire admirer je ne fais point de ligue :
Mon travail sans appui monte sur le théâtre,
Chacun en liberté le blâme ou l’idolâtre ;
Là, sans que mes amis prêchent leurs sentiments,
J’arrache quelquefois trop d’applaudissements….
Je satisfais ensemble et peuple et courtisans,…
Et mes vers en tous lieux sont mes seuls partisans….
Je ne dois qu’à moi seul toute ma renommée,
Et pense toutefois n’avoir point de rival
À qui je fasse tort en le traitant d’égal.

Cette fierté qui prenait son rang, et le premier, irrita les faiseurs de comédies qui ne pensaient pas moins avantageusement d’eux-mêmes. Ils fondirent sur Corneille avec fureur. Il s’échangea dans cette fameuse querelle plus d’injures que d’idées, et l’auteur assailli ne demeura pas en reste avec ses adversaires.

Aussi ne m’arrêterai-je point après tant d’autres à feuilleter tous les écrits que Scudéry, Mairet, Claveret, Corneille, que le « véritable ami de MM. Scudéry et Corneille », et le « bourgeois de Paris, marguillier de sa paroisse », lancèrent dans le public. Je ne m’attarderai pas à scruter les motifs de l’hostilité de Richelieu, qui sans doute, s’il en avait eu d’autres que de littéraires, eût interdit la pièce ou logé l’auteur à la Bastille. Je ne raconterai point l’obligation où Richelieu mit l’Académie de condamner le Cid, la répugnance et l’obéissance de l’Académie, et la difficulté qu’elle eut à trouver une