passif, producteur de joie ou de douleur : il faudra qu’il soit actif, qu’il marche à un but, consulte, résolve, achève.
C’est une révolution dans l’art, et toute la structure, tout le mécanisme de la tragédie en sont modifiés. D’abord si l’intérêt n’est plus de voir un fait s’étaler en ses aspects pathétiques, mais consiste à suivre la génération d’un fait qui se prépare, se forme, se produit par des ressorts bien agencés, qui tour à tour s’approche ou s’éloigne jusqu’à ce qu’enfin il se fixe sous nos yeux, le rôle du personnage principal, où l’intérêt se concentre, va être renversé. Comme jadis le maximum de souffrance, maintenant le maximum d’activité va lui être attribué. Il était le centre des douleurs, il va être la source d’énergie. Si la constitution du genre exige qu’il nous émeuve par son péril et sa misère, il fera lui-même sa misère ou son péril. De patient, comme était encore surtout Sophonisbe chez Mairet, il devient agent de sa destinée. Il s’empare de l’action dès que la pièce s’ouvre, et la conduit jusqu’au dénouement par la force qu’il exerce. Ainsi le Cid, Horace, Auguste, Polyeucte sont les ouvriers de la besogne scénique.
Par une conséquence naturelle, la connaissance des moyens du fait prend la place qu’occupait dans l’ancienne tragédie l’impression de la qualité du fait. Et tout ce qui ne servait qu’à l’émotion va disparaître ou se transformer pour servir à la production des effets, à la notation des causes. Ainsi les ombres, les Furies, qui venaient dès le début imprégner d’horreur les âmes des spectateurs par une représentation anticipée de l’événement funeste, disparaîtront : les