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CORNEILLE.

dans la vieille bourgeoisie rouennaise : sa mère, Marthe le Pesant, était fille d’un bailli de Longueville, petite-fille d’un avocat de Rouen.

Si l’on se plaît à retrouver dans l’œuvre d’un écrivain l’empreinte de la race, l’origine normande de Corneille expliquera ce goût de chicane et de plaiderie que ses héros apportent à délibérer ou défendre leurs actes, ce caractère si nettement pratique et actif, exclusif des poétiques rêveries et des mélancolies sentimentales, qui est l’un des traits les plus marqués de son génie dramatique.

Lorsque le maître enquêteur mourut en 1639, il laissa cinq enfants vivants[1] : après Pierre étaient venus Marie, Antoine, Marthe, Thomas. Marie était mariée depuis cinq ans. Antoine était chanoine de Saint-Augustin : il eut plus tard la cure de Fréville. Marthe, née en 1623, épousera en 1650 l’avocat rouennais Le Bovyer de Fontenelle. Thomas, qui devait suivre les traces de son aîné, n’avait pas quatorze ans ; il était élevé aux Jésuites de Rouen.

C’était une honorable famille bourgeoise, considérée, sans être illustre, et, sans être riche, aisée. Le père, à sa mort, laissa les deux maisons de la rue de la Pie, « une maison manante, grange, étable et fournil », avec 24 hectares de terre, à Petit-Couronne, divers biens encore au Val de la Haye, à Cléon, à Orival, et des fonds, qui, par les place-

  1. Il avait eu en outre deux filles du nom de Madeleine. M. Bouquet dit qu’on ne sait rien de la première, née en janvier 1618. Je croirais volontiers qu’elle était morte le 27 juin 1629, quand le père donna le même nom de Madeleine à un septième enfant, qui mourut avant lui vers 1635.