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BOILEAU.

Et puis, ne conviendrons-nous pas qu’un héros poétique fait mieux de s’appeler Pyrrhus que Manco-Capac ?

Au troisième degré sont les lois particulières des genres. Tous les genres que Boileau énumère ont cela de commun, que leur base constante et leur élément essentiel, c’est le vers. Il ne vaudrait pas la peine de le remarquer, si cette observation banale ne nous donnait la clef de l’omission de la Fable et de La Fontaine. Que de raisons, tirées souvent de bien loin, et bien injurieuses aussi au caractère de Despréaux, n’a-t-on pas invoquées pour rendre compte du silence qu’il a gardé sur son ami ! Il eût suffi pourtant de se dire que l’idylle, l’élégie, l’ode, le sonnet, l’épigramme, le rondeau, le madrigal, la satire, la chanson, tous ces genres dont quelques-uns sont si minces, ne sauraient se concevoir séparés de la forme poétique. Ôtez-la : ou bien la définition s’évanouit dans le vague, ou elle implique contradiction. Un madrigal en prose, une élégie en prose, ce sont de pures métaphores. Une ode en prose, un sonnet en prose, cela est inconcevable. De même, selon les idées de Boileau, déterminées par la tradition gréco-romaine, on ne doit pas écrire l’épopée, ni la tragédie, ni la comédie en prose : ne savons-nous pas les colères de Voltaire, quand il entendait parler d’un Maillard ou Paris sauvé, en prose, et qu’aussitôt après la mort de Molière, les comédiens firent mettre son Don Juan en méchants vers par Thomas Corneille, pour ne pas donner au