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mémorable, le plus émouvant. Marie-Thérèse aurait un jour aperçu ce frère chéri, ce frère malheureux ; elle aurait passé à quelques pas de lui ; ses gardiens — ces gardiens dont elle se loue — auraient eu le courage barbare de lui ravir une consolation fugitive que le hasard lui offrait ; ils auraient eu la dureté et la présence d’esprit d’arrêter l’élan qui devait irrésistiblement la jeter dans les bras de son frère, ils l’auraient précipitée dans sa chambre pour empêcher un appel et un cri d’étonnement douloureux et joyeux tout à la fois ; — et Marie-Thérèse aurait oublié cette scène inoubliable !

Non ! cela est impossible. M. de Beauchesne et l’honnête Gomin ont eu leurs raisons pour inventer cet épisode : des raisons qu’il ne convient pas de rechercher ici. Ou bien alors ce serait Madame Royale qui aurait été empêchée de parler de cette rencontre avec l’enfant détenu auprès d’elle, par des raisons que la sagacité du lecteur saura apercevoir.

Dans tous les cas, un fait subsiste : c’est qu’un sentiment invincible a contraint, aussi bien les historiens naïvement bienveillants que les panégyristes de parti pris, à pallier, par des suppositions gratuites, la choquante indifférence que laisse voir la Relation de