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autres. Des collections de faits historiques, formées en vue de l’interprétation des textes littéraires, ou par simple curiosité pour les choses anciennes, il y en avait eu dès l’antiquité ; mais les pots-pourris d’Athénée et d’Aulu-Gelle, les compilations plus vastes et mieux ordonnées qui datent du moyen âge et de la Renaissance, ne sont nullement comparables aux « Manuels scientifiques » dont les professeurs allemands donnèrent alors les modèles. D’ailleurs ces professeurs contribuèrent à débrouiller l’idée générale, confuse, que les philosophes avaient de la « civilisation », car ils s’appliquèrent à organiser, en autant de branches d’études spéciales, l’histoire des langues, des littératures, des arts, des religions, du droit, de la vie économique, etc. — Ainsi, le terrain de l’histoire s’élargit beaucoup, et l’exposition scientifique, c’est-à-dire objective et simple, commença à faire concurrence aux formes à l’antique, oratoires ou sentencieuses, patriotiques ou philosophiques.

Concurrence d’abord timide et obscure, car le début du xixe siècle fut marqué par une renaissance littéraire, qui rafraîchit la littérature historique. Sous l’influence du mouvement romantique, les historiens cherchèrent des procédés d’exposition plus vivants que ceux de leurs prédécesseurs, propres à frapper, à « émouvoir » le public, à lui donner une impression poétique des réalités disparues. — Les uns s’efforcèrent de conserver la couleur des documents originaux, en les adaptant : « Charmé des récits contemporains, dit Barante, j’ai tâché de composer une narration suivie qui leur empruntât l’intérêt dont ils sont animés » ; cela mène directement à supprimer toute critique, et à reproduire ce qui fait bien. — Les autres professèrent qu’il faut présenter les faits passés avec l’émotion d’un