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la statistique de tous les cas où deux usages se rencontrent ensemble. C’est le principe des tables de concordance de Bacon ; il est à craindre qu’il ne donne pas plus de résultats. — Le vice de tous ces procédés est d’opérer sur des notions abstraites, en partie arbitraires, parfois même sur des rapprochements de mots, sans connaître l’ensemble des conditions où se sont produits les faits.

On pourrait imaginer une méthode plus concrète qui, au lieu de fragments, comparerait des ensembles, c’est-à-dire des sociétés tout entières, soit la même société à deux moments de son évolution (l’Angleterre au xvie et au xixe siècle), soit des évolutions d’ensemble de plusieurs sociétés, contemporaines l’une de l’autre (Angleterre et France) ou d’époques différentes (Rome et l’Angleterre). Elle pourrait servir négativement, pour s’assurer qu’un fait n’est pas l’effet nécessaire d’un autre, puisqu’on ne les trouve pas toujours liés (par exemple l’émancipation des femmes et le christianisme). Mais on ne peut guère en attendre de résultats positifs, car la concomitance de deux faits dans plusieurs séries n’indique pas s’ils sont cause l’un de l’autre ou seulement effets d’une même cause.

La recherche méthodique des causes d’un fait exige une analyse des conditions où se produit le fait, de façon à isoler la condition nécessaire qui est la cause ; elle suppose donc la connaissance complète de ces conditions. C’est précisément ce qui manque en histoire. Il faut donc renoncer à atteindre les causes par une méthode directe, comme dans les autres sciences.

En fait cependant, les historiens usent souvent de la notion de cause, indispensable, on l’a montré plus haut, pour formuler les événements et construire les périodes. C’est qu’ils connaissent les causes soit par les