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critique de ces tentatives, si nombreuses au xixe siècle ; nous essaierons du moins d’indiquer par quelles voies on a abordé le problème et ce qui a empêché d’atteindre une solution scientifique.

Le procédé le plus naturel d’explication consiste à admettre qu’une cause transcendante, la Providence, dirige tous les faits de l’histoire vers un but connu de Dieu[1]. Cette explication ne peut être que le couronnement métaphysique d’une construction scientifique, car le propre de la science est de n’étudier que les causes déterminantes. L’historien, pas plus que le chimiste ou le naturaliste, n’a à rechercher la cause première ou les causes finales. En fait on ne s’arrête plus guère aujourd’hui à discuter, sous sa forme théologique, la théorie de la Providence dans l’histoire.

Mais la tendance à expliquer les faits historiques par des causes transcendantes persiste dans des théories plus modernes où la métaphysique se déguise sous des formes scientifiques. Les historiens au xixe siècle ont subi si fortement l’action de l’éducation philosophique que la plupart introduisent, parfois même à leur insu, des formules métaphysiques dans la construction de l’histoire. Il suffira d’énumérer ces systèmes et d’en montrer le caractère métaphysique pour que les historiens réfléchis soient avertis de s’en défier.

La théorie du caractère rationnel de l’histoire repose sur l’idée que tout fait historique réel est en même temps « rationnel », c’est-à-dire conforme à un plan d’ensemble intelligible ; d’ordinaire on admet comme sous-entendu que tout fait social a sa raison d’être dans

  1. C’est encore le système de plusieurs auteurs contemporains, le juriste belge Laurent dans ses Études sur l’histoire de l’humanité, l’Allemand Rocholl, et même Flint, l’historien anglais de la philosophie de l’histoire.