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tique des documents. Ils en sortent dans l’état où l’analyse les a mis, hachés menu en affirmations élémentaires ; car une seule phrase contient plusieurs affirmations, on a souvent accepté les unes et rejeté les autres ; chacune de ces affirmations constitue un fait.

Les faits historiques ont ce caractère commun d’être tirés tous des documents ; mais ils sont très disparates.

1o Ils représentent des phénomènes de nature très différente. D’un même document on tire des faits d’écriture, de langue, de style, de doctrines, d’usages, d’événements. L’inscription de Mesha fournit des faits d’écriture et de langue moabites, le fait de la croyance au dieu Khamos, les pratiques de son culte, les faits de guerre des Moabites contre Israël. Tous les faits nous arrivent ainsi pêle-mêle, sans distinction de nature. Ce mélange de faits hétérogènes est un des caractères qui différencient l’histoire des autres sciences. Les sciences d’observation directe choisissent les faits qu’elles veulent étudier, et systématiquement se bornent à observer les faits d’une seule espèce. Les sciences documentaires reçoivent les faits tout observés de la main des auteurs de documents qui les leur livrent en désordre. Pour les tirer de ce désordre, il faut les trier et les grouper par espèces. Mais pour les trier il faudrait savoir avec précision ce qui doit en histoire constituer une espèce de faits ; pour les grouper il faudrait un principe de classement approprié aux faits historiques. Or sur ces deux questions capitales les historiens ne sont pas arrivés encore à formuler de règles précises.

2o Les faits historiques se présentent à des degrés de généralité très différents, depuis les faits très généraux communs à tout un peuple et qui ont duré des