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en particulier pour chacune des affirmations. La réponse est donnée par l’expérience. Tout mensonge, petit ou grand, a pour cause l’intention particulière de l’auteur de produire sur son lecteur une impression particulière. Le questionnaire est ainsi ramené à une liste des intentions qui en général peuvent entraîner un auteur à mentir. Voici les cas les plus importants.

1er cas. L’auteur cherche à se procurer un avantage pratique ; il veut tromper le lecteur du document pour l’engager à un acte ou l’en détourner ; il donne sciemment un renseignement faux : on dit alors que l’auteur a un intérêt à mentir. C’est le cas de la plupart des actes officiels. Même dans les documents qui n’ont pas été rédigés pour un motif pratique, toute affirmation intéressée risque d’être mensongère. Pour déterminer quelles sont les affirmations suspectes, il faut se demander quel a pu être le but de l’auteur en général en écrivant l’ensemble du document, en particulier en rédigeant chacune des affirmations particulières qui composent le document. Mais il faut résister à deux tendances naturelles. — L’une est de chercher quel intérêt avait l’auteur à mentir, ce qui revient à chercher l’intérêt que nous aurions eu à sa place ; il faut au contraire se demander l’intérêt que lui-même croyait y avoir et on doit le chercher dans ses goûts et son idéal. — L’autre tendance est de tenir compte seulement de l’intérêt individuel de l’auteur ; il faut prévoir au contraire que l’auteur a pu donner de faux renseignements dans un intérêt collectif. C’est une des difficultés de la critique. Un auteur est membre à la fois de plusieurs groupes, famille, province, patrie, secte religieuse, parti politique, classe sociale, dont les intérêts sont souvent en conflit ; il faut savoir démêler