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au savoir, comme il est plus facile de travailler mal que de travailler bien, et l’important, à leurs yeux, étant de réussir, ils concluraient volontiers que peu importe de travailler mal, pourvu que l’on réussisse. — Pourquoi n’en serait-il pas, en effet, ici, comme dans la vie, où le succès ne va pas nécessairement aux meilleurs ? — Eh bien ! c’est grâce à l’impitoyable sévérité des érudits que de pareils raisonnements seraient, en même temps qu’une bassesse, un détestable calcul.

Vers la fin du Second Empire, en France, il n’y avait pas, en matière de travaux historiques, d’opinion publique éclairée. De mauvais livres d’érudition historique étaient publiés impunément et procuraient même parfois à ceux qui les avaient faits des honneurs illégitimes. C’est alors que les fondateurs de la Revue critique d’histoire et de littérature entreprirent de réagir contre cet état de choses, qu’ils jugeaient, à bon droit, démoralisant. À cet effet, ils administrèrent aux érudits sans conscience ou sans méthode des corrections publiques, propres à les dégoûter pour toujours de l’érudition. Ils procédèrent à des exécutions mémorables, non pas pour le plaisir, mais avec le ferme propos de créer une censure, et, par conséquent, une justice, par la terreur, dans le domaine des études historiques. Les mauvais travailleurs furent, dès lors, pourchassés, et, sans doute, la Revue n’entama pas profondément les couches épaisses du grand public, mais elle exerça cependant sa police dans un rayon assez étendu pour inculquer bon gré mal gré à la plupart des intéressés l’habitude de la sincérité et le respect de la méthode. Depuis vingt-cinq ans, l’impulsion qu’elle a donnée s’est propagée au delà de toute espérance.

Aujourd’hui, il est devenu très difficile, dans le